Elle fut créée à l'emplacement et au sud de la porte de Longue-Maisière.
La place Gambetta, l'une des réalisations les plus étonnantes du siècle dernier, véritable centre de la ville, s'est appelée successivement place de la Belle-Croix (XVIe siècle), place d'Armes, place Périgord (XVIIIe siècle) du nom du gouverneur de Picardie, duc de Talleyrand-Périgord, place de la Concorde pendant la révolution puis à nouveau place de Périgord. Le plan dressé en 1781 par Rousseau architecte de la ville, n'a été réalisé qu'en partie. La place Périgord a accueilli le marché au blé jusqu'à la construction de la "Halle au blé" en 1790.
L'horloge monumentale de la place Gambetta avait été offerte en 1896 par M. Dewailly ancien maire. Son "Style 1900" caractéristique n'a pas trouvé grâce auprès des novateurs. C'était un lieu de rendez-vous, beaucoup de couples se rencontraient au pied de l'horloge surnommée par certain "le poteau de l'amour".
À leur retour d'exode, après les évènements de mai 1940, les Amiénois stupéfaits et anéantis, ne reconnurent leur place Gambetta qu'à la fameuse horloge se dressant toute seule au milieu des monceaux de gravats et de quelques pans de murs déchiquetés. Ce "no man's land" s'étendait à l'infini et seuls apparaissaient le clocher de l'église Saint-Leu, les tours de la Cathédrale et le beffroi décapité.
Seule "Marie", la statue de bronze allégorie du "Printemps", par le sculpteur Albert ROZE, appelée familièrement par les Amiénois "Marie-Sans-Chemise" a été épargnée et réinstallée rue des Sergents. Et chaque année, le jour de la Saint-Nicolas, au cours de leur monome, les étudiants lui passaient une chemise.
Bâtir l'avenir sans oublier le passé : quel projet illustrerait mieux cette volonté que de rendre aux Amiénois l'horloge Dewailly, disparue dans la tourmente des guerres de ce siècle ?
Gilles de Robien l'avait promis aux Amiénois : l'horloge Dewailly sera reconstruite à l'identique et retrouvera sa place au coeur du centre-ville dès l'an 2000. Avec une grande émotion, des centaines d'Amiénois ont découvert la nouvelle horloge, qui a fait l'objet de nombreuses conversations.
Ce 31 décembre 1999 à midi, l'horloge frappée du millésime 2000 sonne ses douze premiers coups. Le bourdon de la cathédrale lui répond comme pour lui souhaiter la bienvenue. Quelle plus belle manière pour Amiens de rappeler fièrement à tous ses habitants son patrimoine. Ce matin, des centaines d'Amiénois attendent l'apparition de la nouvelle horloge (réplique exacte de l'ancienne). Elle rythma leur vie de labeur jusque dans les années cinquante. L'horloge a survécu aux deux guerres. Elle a été enlevée en 1953, les responsables de la reconstruction ayant jugé qu'elle "nuirait à l'architecture amiénoise" !
C'est à 11 h 30 que la nouvelle horloge "Dewailly" se découvre. Alors que lentement, le voile qui la cache se lève, les applaudissements retentissent.
Les petits enfants de l'architecte Charles-Émile Riquiez, qui a conçu l'horloge en 1882, ne cachent pas leur émotion. Stefan Minev, l'un des ferronniers qui a travaillé à sa réalisation, est très ému. L'architecte François Vasselle qui a eu, selon ses propres mots, la chance de travailler sur une telle reconstitution, rend un hommage aux artisans picards qui ont contribué à la réalisation du projet et qui ont relevé ce défi, en à peine un an. Il a fallu cinq ans pour construire la première horloge Dewailly.
Gilles de Robien, heureux de rendre aux Amiénois leur horloge, lance ces quelques mots : "En reconstituant à l'identique la célèbre horloge, la ville d'Amiens et ses partenaires ont décidé de réparer définitivement les cicatrices du XXe siècle. Cette reconstitution est non seulement une prouesse artistique, elle est une formidable invitation à retrouver le fil de l'histoire".